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Read Ebook: Les grandes chroniques de France (1/6) selon que elles sont conservées en l'Eglise de Saint-Denis en France by Paris Paulin Editor

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Ebook has 506 lines and 128650 words, and 11 pages

Celui qui ceste euvre commence, ? tous ceus qui cette histoire liront salut en nostre Seigneur! Pour ce que plusieurs gens doutoient de la g?n?alogie des roys de France, de quel original et de quelle ligni?e ils sont descendus, emprist-il ceste euvre ? faire, par le commandement de tel homme que il ne put ni ne dut refuser. Mais pour ce que sa lettr?ure et la simplesce de son engin ne souffist pas ? traitier de euvre de si haute histoire, il prie au commencement ? tous ceus qui ce livre liront, que ce que ils y trouveront ? blasmer, ils le souffrent patiamment sans vilaine reprehension. Car si comme il a dit devant, les d?fauts de lettr?ure et de loquence qui en lui sont et la simplesce de son engin le doivent escuser par raison.

Note 4: Vincent de Beauvais.

Note 8: Le reste du prologue n'est pas dans Aimoin. C'est probablement une addition de notre traducteur.

LIVRE PREMIER

Quatre cens et quatre ans avant que Rome fut fond?e, r?gnoit Priant en Troie la grant. Il envoia Paris, l'aisn? de ses fils, en Gr?ce, pour ravir la royne H?l?ne, la femme au roy M?nalaus, pour soi vengier de une honte que les Grecs lui eurent j? faite. Les Grecs qui moult furent corrouci?s de ceste chose s'esmurent et vindrent ass?gier Troie.

A ce si?ge qui dis ans dura, furent occis tous les fils au roy Priant, lui et la royne Ecuba sa femme. La cit? fu arse et destruite, le peuple et les barons occis. Mais aucuns eschap?rent de cele pestilence et plusieurs des princes de la cit?, qui s'espandirent en diverses parties du monde pour querre nouvelles habitacions; comme H?l?nus, ?n?as et Anth?nor, et maint autre. Cil H?l?nus fu l'un des fils au roy Priant, et si estoit po?te et bons clerc. Il enmena avec lui mil deus cens des exili?s de Troie: en Gr?ce s'en ala au r?gne Pandrase: de lui sortit grant lign?e. En?as qui refut un des grans princes de Troie, se mist en mer avec quatre mil et quatre cens Troiens; en Cartage arriva apr?s grans p?rils et grans tourmens que il eut en mer souffers. Avec Dido, la royne de la cit?, demoura une pi?ce de temps, puis s'en partit et arriva en Ytalie qui, par sort, lui estoit destin?e selon les fables Ovidiennes. La terre conquist et r?gna, puis, trois ans. Apr?s sa mort, Ascanius son fils espousa Lavine, la fille au roy Latin: un fils eut de celle dame qui fu appel? Silvius. Quant il fu grans et parcr?us, il hanta tant ?s chambres de sa m?re que il engroissa une siene ni?ce, si engendra en elle Brut. Ce Brutus enmena puis la lign?e de Lern dont nous avons dessus touchi?, en l'ile d'Albion qui ore est apel?e Angleterre, et Corin?e qui estoit descendu de la lign?e de Anth?nor. Quant ils eurent cette ?le prise, qui au temps de lors estoit habit?e de jaians, Corin?e ot ? sa part une contr?e de la terre qui encore est apelee Cornouaille, par la raison de son nom. L'autre partie de la terre que Brutus retint ? soy, refut de son nom apel?e Bretaigne. Lors fonda une cit? tout ? la semblance de Troie la grant, et l'apella Trinovaque, c'est-?-dire Troie nouvelle. De celui Brut descendirent tous les roys qui puis furent en la terre, jusques au temps que Anglois, qui vinrent de une des contr?es de Saissoingne qui estoit apell?e Angle, pristrent la terre, des quels elle est apel?e Angleterre.

Note 10: Voy. le roman de Brut, termin? en 1165, et qui le plus souvent traduit Geoffroi de Montmouth.

Turcus et Francio qui estoient cousins germains, se d?partirent de leur contr?e et al?rent habiter de lez une terre qui est apel?e Trace. L? demour?rent sur un fleuve qui a nom la Dinoe. Quant ensemble eurent habit? un grant temps, Turcus se d?partit de Francio son cousin, lui et une partie du peuple que il enmena avec soi: en une contr?e s'en ala qui est nomm?e Stice la petite. En celle terre habita si longuement lui et sa gent, que ils cr??rent de eus quatre mani?res de gens, Austroghotes, Ypoghotes, Wandes et Normans. Francio demeura sur le devant dit fleuve, apr?s que son cousin se fut de lui d?parti. L? fond?rent une cit? que ils apel?rent Sicambre; longuement furent apel?s Sicambriens, pour le nom de cele cit?. Tributaires estoient aus Romains aussi comme les autres nascions. Mil cinq cens ans et sept demeur?rent en celle cit?, puis que ils l'eurent fond?e.

Apr?s, il avint, au temps de Valentinien l'empereour des Romains, qui r?gna puis la passion Jh?sucrist trois cens et soixante-seize ans, que une mani?re de gens qui estoient apell?s Alains, habitoient ez palus de Meode: fortes gens estoient et batailleurs. A celui empereur Valentinien se combatirent plusieurs fois. Aucunes fois les vainqui et les embati par force dedans les dites palus; mais les Romains ne les purent suivre, car les lieux estoient si forts et si p?rilleus pour les fontaines et pour les mareschi?res, que quant ils estoient dedans embatus, ils ne les pouvoient de riens gr?ver.

Quant l'empereour vit ce, il apela en son aide les Troiens qui habitoient en Sicambre et leur pria qu'ils feissent une voie tant seulement, par quoi sa gent peussent venir ? ses ennemis soudainement. Ils lui respondirent que ils ne feroient pas ce sans plus, ains lui promirent que ils les prendroient et chasceroient fors par force. L'empereour qui moult li? fut de cele response, leur quitta le treu de dix ans, s'ils povoient ce faire.

Joyeux furent les Troiens de la promesse l'empereour: soudainement se f?rirent ?s palus, comme ceux qui bien savoient esquiver les p?rils et les maus-pas que ils connoissoient; les Alains de euls ne se prenoient garde; car ils cuidoient que nuls ne se peust jusques ? euls venir, pour la forteresce des lieux. Grant partie en occistrent, et aucuns en pristrent.

L'empereour s'esmerveilla moult de la force et de la hardiesce des Troiens, pour ce que ils avoient os? entrer en lieux si p?rilleux, occire, prendre et chascier les plus grans ennemis de l'empire; ce que les Romains vainqueurs de tout le monde n'osoient faire: pour ce les apela-on lors Fran?ois; par la raison de leur fiert?.

Autre opinion pourquoi ils furent dits Fran?ois: aucuns des aucteurs racontent qu'ils furent apell?s Fran?ois du nom d'un prince que ils orent, qui estoit apell? Francio, duquel nous avons l?-dessus parl?; et dient ainsi que quant ils se d?partirent de Troie la grant, ils firent un roy qui eut nom Frigan; puis al?rent par maintes r?gions jusques en Aise la grant. L? se devis?rent en deus parties, d?s quelles l'une habita en Gr?ce en la terre de Mac?doine; par la vertu des quels les Mac?doniens furent si redout?s que ils firent moult de batailles et orent plusieurs victoires par leur aide au temps le roy Phelippe et le grant roy Alixandre son fils. L'autre partie de ce devant dit peuple ala en Europe: habitacion prist entre la grant mer et une r?gion qui est apell?e Trace sur la rive de la Dinoe. Quant ainsi orent l? habit? une pi?ce de temps, ils se d?viserent en deus parties, et furent deus nascions diverses, apel?es par divers noms; car les uns furent nomm?s Torgotins, pour leur roy qui estoit apell? Torgotus, et les autres, pour leur roy qui avoit nom Francion, furent apel?s Fran?ois, qui chaci?rent les Alains des palus de M?ode, si comme nous avons la sus dit, ? la requeste l'empereour de Rome.

ANNEE 376.

Quant les dis ans fuient trespass?s, l'empereour Valentin, duquel nous avons parl? dessus, envoia ses messages aus Troiens, pour querir le treu que ils avoient, devant les dis ans, accoustum? ? paier. Ils respondirent aus messages que ils en estoient quites par le pris de leur sanc, et que pour eus racheter de ce treu ? tous-jours-mais, s'estoient-ils mis en p?ril de mort; et que jamais treu ne leur rendroient. L'empereour plain d'ire et d'indignacion vint sur eus ? grant ost; ses batailles ordona pour combattre; et les Troiens bien que ils ne fussent que une seule nascion assez petite contr? l'empire de Rome, issirent ? bataille. Mais quant ils virent que la force des autres nascions estoit ajoust?e avec les Romains, ils surent bien que ils ne pourroient avoir longue dur?e encontre si grant pueple: pour ce, jugi?rent plus profitable chose ? cesser que ? combattre. Leur cit? guerpirent lors, car ils ne vouloient plus estre tributaires: en Germanie descendirent, les rivages prirent du fleuve qui est apell? le Rin: trois ducs firent de leur gent pour eus gouverner: l'un eut nom Marchomires, l'autre Sunnones, et le tiers Genebaus. Leur peuple estoit ja fortement moutepli? et cru: car au temps qu'ils issirent de Aise, ils n'estoient pas plus de douze mille de gent d'armes, et j? estoient si moutepli?, que les Germains et les Alemans, qui en quantit? et en force sont puissans, avoient merveilleusement paour de eus. Parmi la terre s'espandirent, et prirent plusieurs chastiaus et plusieurs cit?s.

En ce temps, r?gnoit l'empereour Th?odosie. Mainte complainte eut des Fran?ois qui Alemaigne avoient ainsi prise: contr'eus envoia ? grant ost Nannie et Quentin qui estoient deus grans maistres de chevaliers. Aus Fran?ois se combatirent, vaincus furent en la premi?re bataille. Quant ils virent ce, ils apel?rent en leur aide Eracle et Jovinien qui estoient deus princes de la chevalerie de Rome. Derechief se combatirent aus Fran?ois tous ensemble; en cele seconde bataille furent les Romains desconfits: mais Eracle et Jovinien s'enfuirent. Et alors firent les Fran?ois si grande occision de Romains, que toutes les autres nascions en furent durement espoent?es, et onques puis ne fu nul qui les osast contraindre ni conseiller de rendre treu. Arbogastes, qui estoit conte de cele gent, s'enfouit aus Romains, apr?s que les Fran?ois les eurent vaincus: mais toutes fois rapareilla-il bataille contre eus: une partie en desconfit, et aus autres fist pais, si comme il est escrit plus plainement en la vie saint Ambroise. En ce temps, prirent les Fran?ois la cit? de Tr?ves par le conseil et par l'aide de Luce, l'un des conseillers de Rome: par ce Luce avoit grant dueil et grant despit de ce que Avites, qui estoit ainsi comme empereour sur la terre de Gaules, avoit g?u ? sa femme: et ce fu la raison pour quoi il le fist.

ANNEE 392.

Toute celle gent ne demeura pas en ce pa?s, ains s'en d?partit une compaignie; vingt-trois mil furent par nombre. Entr'eus firent un duc qui eut nom Ybors. Ils laissi?rent Alemaigne et Germanie, pour querir nouvele habitacion. En Gaule arriv?rent: le pa?s et la terre leur plut moult, et moult leur sembla d?litable ? demourer. Sur le fleuve de Saine habit?rent et fond?rent une cit? qu'ils nomm?rent Leuth?ce, , huit cent et quatre vins et quinze ans devant l'incarnation nostre Seigneur: l? habit?rent, mil deus cent soixante dis ans puis que leur ancesseur se furent partis de Sicambre. En ce temps vivoient simplement, peu savoient de l'usage d'armes. Au temps de lors n'avoit onques en roy en France; chascun faisoit ce que bon lui sembloit: mais toutes-fois estoient ils subgects aus Romains et faisoient, chascun an, nouviaus conseilleurs de leur gent, meismes pour le peuple gouverner, ainsi comme ceus de Rome.

En ce temps, entra Marchomires en France. Ce Marchomires avoit est? fils au roy Priant d'Osteriche, qui estoit descendu de la ligni?e le grant roy Priant de Troie. Ceus de Gaule le re?urent moult honnourablement et toute sa gent; et pour ce que il leur enseigna l'usage des armes, et que il fist clore les cit?s et les chastiaus de murailles contre les assaus des larrons, l'establirent-ils gouverneur et deffendeur du pa?s; et aussi, pour ce que il estoit descendu de la ligni?e de Troie comme ils estoient, ils furent tout un peuple et une gent.

Ce Marchomires avoit un fils qui eut nom Pharamons, noble chevalier estoit et preus aus armes. Les Fran?ois qui voulurent avoir roy, aussi comme les autres nascions, prirent ce Pharamons par le conseil Marchomire son p?re: seigneur et roy le firent sur eus, et lui leissi?rent le pa?s ? gouverner. Pharamons fut le premier roy de France: car ? ce temps n'avoit onques eu roy: ains estoit le pa?s sous l'empire de Rome. Pour ce que Marchomires vouloit aquerir leur gr?ce et leur amour, mua le nom de la cit? qui devant estoit apel?e Leuth?ce, qui vaut autant ? dire comme ville plaine de boue, et lui mist nom Paris, pour Paris, l'aisn? fils au grant roy Priant de Troie, de la quelle ligni?e il estoit descendu: car tous ceuls qui de celle g?n?racion estoient, en quelque terre que ils fussent, d?siroient moult que leur nom et leur renomm?e fust espandue et moutepli?e par tout le monde. Ce roy Pharamons gouverna noblement le royaume tant comme il vesqui: mort fu quant il eut r?gn? vint ans.

ANNEE 427.

Jusques ici, nous avons r?cit?es les opinions d'aucuns aucteurs; mais pour ce que nous ne volons pas que l'on puisse trouver contrari?t? en ceste lettre, nous prendrons la mati?re comme elle gist ?s Croniques qui ainsi disent que les Fran?ois quand se partirent de Sicambre et quand ils eurent Alemaigne et Germanie conquise, coronn?rent un roy qui eut nom Pharamont. Ce Pharamont engendra Clodio, qui apr?s lui fu roy. Apel? fu Clodio le chevelu: car en ce temps estoient les roys chevelus.

Peu de temps apr?s que le roy Clodio fu couronn?, lui et les Fran?ois se prirent ? enva?r les terres voisines et ? courir sus ? ceus qui ? eus marchissoient. Ils d?gast?rent la contr?e de une gent qui pr?s d'eus habitoient, et que on apeloit Toringiens: cele terre siet en une partie d'Alemaigne. Un chastel prirent qui estoit nomm? Dispargue et en ce chastel le roy establit le si?ge de son r?gne.

Note 27: On croit recono?tre Dispargue dans la ville de Doesbourg, entre Bruxelles et Louvain.

D?s lors commen?oit j? l'empire de Rome ? abaissier et ? d?cheoir, et la force des Romains qui souloit estre compar?e ? force de fer, estoit j? ch?ue en la fragilit? qui est compar?e ? pos de terre: car les Bourgoignons avoient j? pourprise et saisie la province de Lyon, et les Gottiens celle d'Aquitaine; et les Romains ne tenoient plus de toute Gaule fors cele partie qui est enclose entre Loire et le Rin.

Le roy Clodio qui moult d?siroit ? eslargir les bornes de son royaume, envoya ses espies oultre le Rin pour savoir quelle deffense le pa?s avoit; puis passa oultre avec tout son ost; la cit? de Cambrai assist et prist; oultre passa parmi la forest de la Charboni?re. A la cit? de Tournai vint, le si?ge mist entour la ville, assez tost apr?s la prist; tous les Romains qui contre lui vinrent, pour le pa?s deffendre, occist et mist ? mort.

Mais pour ce que nous avons ci fait mencion de deus provinces de Gaule, qui ore est appel?e France, avenante chose est que soit mise ici la distinction de toute Gaule en la mani?re que la descrit Jules C?sar, qui en dis ans la conquist. A lui s'accorde Plinius et mains autres philosophes. En trois provinces principaus est toute Gaule devis?e. La premi?re si est Celle qui vaut autant ? dire comme celle de Lyon; la seconde celle de Belge; et la tierce celle d'Aquitaine. La province de Lyon, qui commence au Rosne et fenist ? Gironde, contient maintes nobles cit?s, desquelles nous ayons ci mis les noms; car par les noms des cit?s sera plus l?gi?rement la description entendue.

La premi?re si est Lyon; Chalons, Ostun, Sens, Troies, Aucerre, Miaus, Paris, Orliens, Chartres, Rouen, Evreus, Lysieux, Avrences, le Mans, Nantes, Renes, Vanes, Angiers, Nevers, Tours et Bourges; mais Sens et Ostun furent jadis de plus grand noblece et de plus grant auctorit? que nule des autres: car la cit? d'Ostun fu comme principale et maistresse de toute Gaule, au temps que Jules C?sar et les Romains tenoient le pa?s; pour ce qu'elle ob?it tous jours volentiers aus empereours de Rome, et garda et nourrit tous jours la gr?ce et l'amour qu'elle avoit aus Romains. La cit? de Sens fu de si grant affaire et de si grant fiert? que les Frans S?nonois assirent Rome et la prirent par force, et enferm?rent les Romains dedans le Capitole; et les Romains les firent retourner, par grant avoir qu'ils leur donn?rent avant qu'ils s'en vousissent partir.

Mais Oroses qui fait une autre distinction de toute Gaule et la devise en quatre provinces, ne s'accorde pas que Tours et Bourges soient en la province de Lyons: ains veut dire que elles sont en celle d'Aquitaine, pour ce que elle commence au fleuve de Loire et dure jusques aus mons de Montjeu. Mains fleuves courent par ceste province, des quels le Rosne est le plus grant.

Apr?s la description de la province de Lyons met Jules C?sar celle de Belge qui commence aus derni?res parties de Gaule par devers le Rin, et dure jusques ? la cit? de Senlis; et s'estent tout contremont vers orient. Les plus nobles cit?s sont ci nom?es: Coloigne, Tongres, Tr?ves, Mez, Toul, Verdun, Rains, Chaalons, Laon, Soissons, Amiens, Noyon, Biauvais, Vermans, Arras, Tournay, Cambray, et maintes autres. Mains fleuves courent par celle province, dont le Rin, Matrone et Muese sont les plus grans; maintes riches forests, des quelles Ardenne est la plus grant: si grant est que elle dure plus de cinq cens milles de lonc.

La tierce province si est celle d'Aquitaine selon la description Plinius et Jules C?sar. Elle commence au fleuve de Gironde, et d'une part jusque aus mons de Montjeu, et d'autre cost? jusques ? l'entr?e d'Espaigne. Maintes nobles cit?s contient. La premi?re est Clermont, Narbonne, Caours, Thoulouse, Gaiete, Rodais, Limoges, Pierregort, Poitiers, Bordiaus, Saintes et Angoulesme. Maintes riches forests contient et maints grands fleuves: deux des plus renomm?s sont Gironde, et Dordonne. Ce fleuve qui est nomm? Dordonne, retient le nom de deus fontaines dont il sourd, dont l'une est apel?e Dor, et l'autre Donne. Si est nomm?e ceste province Aquitaine, pour ce qu'elle est plus habondant de fontaines et de fleuves que nulle des autres. Quant les Fran?ois eurent conquis toutes ces provinces, ils les devis?rent en deus parties tant seulement. La partie devers Septentrion, qui est enclose entre Meuse et le Rin, apel?rent Austrie; celle qui est entre Meuse et Loire, apel?rent Neustrie, et par ce nom fu jadis Normendie apel?e, avant que Normans la prissent. La partie devers Lyons que les Bourgoignons pristrent, retint le nom de eus; pour ce fu-elle apel?e Bourgoigne. Ci avons descrit le si?ge de toute Gaule au mieus que nous povons, selon les livres des anciens aucteurs.

ANNEE 447.

Quant le roy Clodio eut r?gn? vint ans, il paia le tribut de nature. Apr?s lui r?gna M?rov?e. Ce M?rov?e ne fu pas son fils, mais il fu de son lignage. De lui sortit la premi?re g?n?ration des rois de France qui dura, sans faillir, jusques ? la g?n?ration de P?pin le secont, le p?re au grant Charlemaine. Et ce roy fu moult profitable au royaume. En ce temps pass?rent le Rin une gent qui estoit apel?e les Huns. La cit? de Tr?ves ravag?rent, tout le pa?s d'entour Tongres brul?rent et gast?rent; en tele mani?re que toute Gaule estoit en batailles et en pers?cutions; par tout r?sonnoient cris, pleurs, douleurs et pestilences, occisions et rapines. Si dura ceste male aventure jusques ? la cit? d'Orliens. La ville assirent et mirent gardes aus portes, que nul n'en peust sortir. En ce temps estoit saint Agnien, ?vesque d'Orliens: le saint homme fist sa pri?re vers nostre Seigneur, pourque il confortast le pa?s et la cit?; Nostre Sire oy sa pri?re, car, par ses oroisons et par sa m?rite, fu l'orgueil de ce peuple si troubl?, qu'il s'enfuirent et se perdirent en telle mani?re que l'on ne put onques puis savoir ce qu'il devindrent, ni o? il habit?rent. Mort fu le roy M?rov?e apr?s ce qu'il eut r?gn? dix-huit ans.

ANNEE 447.

Un fils eut le roy M?rov?e, qui eut nom Child?ric; coronn? fu apr?s la mort de sont p?re, mais il ne commen?a pas ? r?gner moult gracieusement: ha? estoit de ses barons pour les vilennies et les hontes qu'il leur faisoit; car il prenoit ? force leur filles ou leur femmes, quant elles lui plaisoient, pour accomplir les d?lis de sa char. Pour ceste raison le chasci?rent hors du royaume, plus ne pouvant souffrir les griefs de sa desfren?e luxure. Quant ainsi fu exili?, il s'enfui ? Bissin, le roy de Toringe, qui moult d?bonnairement le re?ut, et le tint avec lui moult honnorablement tout le temps de soir exil. Mais nul n'est si ha? qu'il n'ait par fois aucun ami. Ce roy Child?ric eut ? ami un des barons qui moult avoit tous jours est? son familier: Guinement avoit nom: par son conseil faisoit le roy moult de choses tandis comme il gouvernoit le royaume. Le roy qui bien savoit que les barons ne l'avoient pas ? cuer et qu'il le mena?oient, apela un jour Guinement, avant que il fust essili? du royaume: conseil lui demanda de ceste chose. Celui-ci lui conseilla que il donnast lieu ? l'ire des barons: car s'il demouroit, il acroitroit plus leur male volont? que il ne l'apetisseroit; et la nature humaine est tele que ils portent envie et haine ? celui que ils voient pr?sent; et quant ils ne le voient mie, aucune fois advient que ils en ont compassion. Il lui promist que il essaieroit les cuers des barons, et s'il povoit il les apaiseroit ? lui: mais pour ce que il n'en pust de riens estre d?ceu, il prit un besant d'or et le coupa parmi, l'une moiti? lui bailla et l'autre retint, puis lui dist ainsi: <> Apr?s ces paroles s'en ala le roy en exil, comme nous avons dit, et celui-ci demoura pour sa besoigne procurer.

ANNEE 457.

Apres que le roy Child?ric se fust destourn? du royaume, les barons qui pas ne vouloient estre sans seigneur, eslirent un roy, Gile avoit nom; Romain estoit de nascion; de par les Romains avoit la cure re?ue de garder ce que ils tenoient de la terre de Gaule. Pas n'estoient remembrans des injures et des griefs que ils avoient fait ? ceus de Rome et ? ce Gilon meisme. Moult est l'umaine pens?e d?ceue et avugl?e qui pense que celui-l? les doive aidier et conseillier ? qui l'on aura fait tant de pers?cutions et tant de dommages: par quel raison conseillera-il son ennemi qui lui aura ses biens gast?s, ses maisons arses, son peuple occis et ses cit?s acravant?es? Guinement, qui tant estoit ami au roy Child?ric, estoit sage et plain de grant malice: tant fit en brief temps que il fu accoint? du roy Gilon, lequel ne faisoit rien sans son conseil, pour ce que il pensoit que il fust le plus loial ami qu'il eust. Bien savoit Guinement qu'il avoit les Fran?ois soupe?onneux; et pour ce lui conseilla tant comme il put que il passast le temps par faintises et par simulacions, et que il les grevast de tributs et de exactions. Mais pour ce que il pensoit bien que les Fran?ois ne se fl?chiroient mie tellement, pour semblables griefs, que ils ne demourassent en hayne vers le roy Child?ric, comme ils avoient commenci?, et que ils ne se tenissent ? Gilon qu'ils avoient esleu, il lui dist en tele mani?re: <> Gilon qui pas n'estoit averti de la malice que celui-ci pensoit, s'acorda ? ce conseil et le soin de ceste besoigne lui confia. Guinement qui eut atendu temps et lieu de ce faire, commen?a ? ceus qui avoient est? plus contraires au roy Child?ric: de crime les accusa et les prist, puis les envoya au roy Gilon pour faire justice. Il commanda aussi tot que ils fussent punis du crime de conspiration et de magest? les?e.

Quant les autres barons virent la cruaut? de Gilon, ils furent fortement esmu contre lui: lors ils vinrent ? Guinement, par lequel conseil Gilon faisoit ce; mais ils ne le savoient mie. A lui se descouvrirent en complaignant de Gilon qui telle cruaut? leur faisoit. Il leur respondi que moult s'esmerveilloit de la l?gi?ret? et de la muablet? de leur cuers, quant ils se plaignoient d?j? de celui que ils ayoient tant lou? un peu devant et jugi? digne du r?gne: puis leur dist: <>

ANNEE 457.

Les barons qui furent encouragi?s de ces paroles et esmeus contre Gilon le Romain, respondirent; <> Moult fu li? Guinement quand il oy ces paroles. Par un certain message envoya au roy Child?ric la moiti? du besant d'or qu'il lui avoit donn? quant il se fu de lui parti, et lui manda en tele mani?re: <> Quant le roy Child?ric oy le message, et il eut la v?rit? sceue par tesmoing du besant, il retourna li?ment en France. Quant il fu enmi voie, il manda Guinement son loial ami qu'il lui venist ? l'encontre promptement. Celui-ci vint ? grant compaignie des barons, droit ? un chastel qui est apell? Bar; puis commanda aus bourgeois et au peuple de la ville que ils receussent le roy leur seigneur honorablement. Eux qui volontiers le firent, le re?urent ? moult grant joie et lui firent tant de honneur comme ils purent. Moult leur en sut le roy bon gr?; et pour l'honneur qu'ils li eurent faite, selon sa lib?ralit?, les franchi du tribut que la ville lui donnoit tous les ans. Grant joie lui firent les barons, et moult se humili?rent vers lui: leurs forces joignirent ensemble pour aller sur Gilon, qui d?j? par aventure s'estoit aperceu de la conspiration qu'ils avoient faite contre lui. A lui se combatirent et le desconfirent ? la premi?re bataille: il s'enfui et s'en ala en la cit? de Soissons que il tenoit: la demoura tout le restant de sa vie. Quant mort fu, Siagres, un sien fils, tint la cit? apr?s lui.

Le roy Child?ric, qui estoit bon chevalier de sa main et sage de conseil, esmut ses batailles contre Odoacre, le roy de Saissoigne: ensemble se combatirent euls et leur gens. Desconfit fu Odoacre et ses batailles; par fuite garanti sa vie. Le roy Child?ric qui moult estoit ardent de le tenir, le cha?a jusques ? Orliens, mais il s'en fui parce que il n'osa attendre sa venue. Le roy assist la ville et la prist par force; un comte romain qui l? estoit, occist, Pons avoit non. Ainsi accrut le roy son r?gne jusques ? Orliens, et puis jusques ? la cit? d'Angiers.

ANNEE 464.

Quant la royne Basine femme de Bissin le roy de Toringe, ? qui le roy s'enfui, sut que Child?ric se fu accord? ? ses barons et qu'il fu receu en son r?gne, elle quitta son seigneur et s'en vint apr?s Child?ric en France; car l'on disoit que il l'avoit cognue tandis que il demouroit avec son seigneur. Il lui demanda pourquoi elle l'avoit suivi, et son seigneur quitt?; elle lui respondi: <> Quant le roy oy ceste response, il la prist par mariage comme paien que il estoit; et ne lui souvint pas des bont?s et des b?n?fices que Bissin le roy de Toringe son premier mari lui eut faites quant il eut est? chaci? de France.

Quant ils furent le soir couchi?s ensemble, et ils furent au secret du lit, la royne l'avertit qu'il se tenist cele nuit d'habiter ? elle; puis lui dist qu'il se levast, et alast devant la porte du palais et lui sut dire ce que il auroit vu. Le roy se leva et fist son commandement. Quant il fu devant la sale, il lui sembla qu'il v?ist grans formes de bestes, ainsi comme d'unicornes, de li?pars et de lyons, qui aloient et venoient par devant le palais. Il retourna tout espoent?, et raconta ? la royne ce que il avoit vu. Elle lui dist que il n'?ut pas paour, et que il retournast arri?res. Quant retourn? fu, il vi grans images de ours et de loups ainsi comme s'ils vousissent courre sus l'un ? l'autre: il retourna au lit de la royne et lui raconta la seconde avision. Elle lui redist que il retournast encore une fois. Quant retourn? fu, il vit figures de chiens et de petites bestes qui se entredesp??oient toutes. Quant il fu retourn? ? la royne et il lui eut tout racont? qu'il eut vu, il lui requist que elle lui fist entendre que ces trois visions sign?fioient; car il savoit bien que elle ne lui avoit pas envoie pour n?ant. Elle lui dist que il se tenist chastement celle nuit et elle lui feroit au matin entendre la signification des trois avisions. Ainsi furent jusques au matin que la royne apela le roy que elle vit moult pensif; puis lui dit: <> Ainsi fu le roi hors de la pens?e en quoi il estoit ch?u pour les avisions, et fu joyeus de la noble ligni?e et du grant nombre des preus hommes qui de lui devoient sortir.

ANNEE 464.

En ce temps, vint en Ytalie Odoacre qui estoit sire d'un peuple qui habite sur les rivages de la Dinoe: fortement estoit devenu orgueilleux pour une victoire qu'il avoit eue contre Phelet?e le roy de Rugie. Avant que il entrast en la terre, il ala parler ? saint Severin qui en ces parties habitoit. Le saint lui dist ainsi comme par proph?tie: <> Car en ce point que il ala visiter le saint homme, il avoit une piau affubl?e. Quant il eut cele parole oye, il entra en Lombardie: assez i fist rapines et occisions et gasta le pa?s, non pas si comme il dut, mais si comme il voulut. Enthemie l'empereour de Rome fu mort en ce point, si fu occis par la tra?son Recim?re son gendre. Odoacre prit fortement ? menacier la cit? de Rome; et les Romains de la menace furent moult espovent?s, meismement pource que ils n'avoient adoncques point d'empereour ni chief qui les gouvernast. Pour ce, envoi?rent leur message ? Lyon, empereour de Constantinoble et lui pri?rent que il leur envoiast un des princes de son palais par quoi ils fussent deffendus de leurs ennemis.

En ce temps estoit Thierri un des plus grans princes du palais de l'empereour, fils avoit est? Th?odore: Celi Th?odore fu n? en une des parties de Gr?ce qui est apel?e Mac?doine et sa femme aussi qui estoit apel?e Lilie: serjant avoit est? ? un des nobles hommes du palais, qui avoit nom Ydaces. Thierri s'estoit si bien prouv? tous jours, que il estoit l'un des plus vaillans hommes de la cour l'empereour, par son sens et par sa prou?ce: car aussi comme il seurmontoit les autres en grandeur de cors, tout aussi les seurmontoit-il en force et en hardiesce. Moult l'avoit l'empereour chier au temps de lors, et maint des s?nateurs pour son sens et pour sa valeur l'honoraient. Quant les messages aus Romains furent devant l'empereour venus et il eut la cause de leur voie entendue, il leur livra Thierri et le fist patrice et deffendeur de toute Ytalie. Quant il fu l? venu, et les Romains l'eurent rec?u, il appareilla ses batailles et se combati contre Odoacre par plusieurs fois. Un jour que il se combati ? lui, il fu desconfit lui et sa gent: tellement que il convint que il fuist. En ce qu'il s'enfuioit droit vers la cit? de Ravenne, Lilie sa m?re lui courut au devant et lui pria que il retournast ? la bataille: mais quant elle vit que il refusoit et doutoit ? retorner, elle lui dist: <> Quant le jouvencel oy ce, il fu tout enflamm? et tout honteus des paroles de sa m?re, y reprist cuer et hardement, et rassembla autant de sa gent comme il en put avoir; au champ de la bataille retorna sur ses ennemis, qui gisoient ?? et l? parmi le champ, comme ceus qui estoient asseur?s pour la victoire qu'ils avoient eue. Une partie en occist, l'autre partie s'enfui, Odoacre prist et assez tost apr?s, l'occist. Ainsi d?livra les Romains et toute Ytalie de lui et de sa gent.

ANNEE 468.

Quant Thierri fu parti de l'empereour, envie qui tous jours dure esmut les cuers d'aucuns des s?nateurs; ils commenci?rent ? diffamer ? lui et ses fais qui estoient dignes de loenge. A l'empereour al?rent, et tant firent et tant lui dirent que ils parvertirent la bonne volont? que il avoit vers lui, et sa gr?ce muerent en hayne: entendre lui firent que il tendoit ? avoir le r?gne esp?rial L'empereour qui trop l?gi?rement les crut, fu si durement esmu contre lui, que il le rapela et manda que il retournat arri?res en Constantinoble: de si desmesur?e hayne le haoit que il avoit propos? que il le feroit occire, tout seul dessevr? de sa gent. Mais Tholom?e, l'un des s?nateurs, qui moult estoit sage homme, et moult avoit tous jours am? Thierri, ne pot onques estre parverti pour nule malice de ses ennemis, que il ne fust tousjours entier en son amour. Quant il aper?ut la traison que ceus machinoient contre son ami, il s'en ala ? l'empereour, quant il vit point et heure, puis lui dit en tel mani?re: <> Pour ce monstra Tholom?e ceste voie ? l'empereour: car il avoit j? envoi? un sien message aus plus grans hommes d'Ytalie, et leur avoit mand? que ils meissent en prison les s?nateurs que l'empereour leur devoit envoier, puis lui remandassent telles paroles: <> Tout ainsi comme cil le manda ainsi le firent, quand l'empereour leur eut envoi? les s?nateurs. Quant l'empereour vit ce, il se douta que ils ne feissent pis, pour ce leur rendi Thierri et re?ut ses s?nateurs. Ainsi fu Thierri d?livr? du p?ril de mort ? celle fois par le conseil de son ami. Quant il fu ? Rome retourn?, il fist diverses batailles contre ses ennemis et vainqui glorieusement partout, comme cil qui moult estoit sage et puissant en armes.

Par plusieurs fois se combati ? une mani?re de gent que on apele les Avares: maintes fois les vainqui, et aucunes fois fu revaincu. Un jour se combati ? eus, si les desconfi et cha?a des champs, moult en ocist en fuiant; il les enchassa jusques ? un fleuve qui est apel? Hester. Quant il eut fait tendre ses tentes sous les rivages de cele eaue, il prist aucuns de ses chevaliers et s'en ala selon la rive du fleuve pour espier ses ennemis, qui de l'autre part estoient. Lors vit venir Xers?s un de ses ennemis d'autre part, pour son ost espier: trois de ses compaignons envoia pour lui prendre. Quant Xers?s les vit venir, il fist semblant de fuir; en ce que ils l'encha?oient, il les ocist tous trois l'un apr?s l'autre. Apr?s ces trois, il en y envoia trois autres qui tout en telle mani?re furent occis. Quant Thierri vit que ses compaignons refusoient, il frappa son cheval des esperons, et s'ala combattre ? lui. Fortement et longuement se combatirent, mais ? la parfin fu Xers?s navr? au bras; pris fu et amen? aus herberges. Quant ainsi fu emprisonn?, Thierri qui moult s'esmerveilloit de sa force et de sa chevalerie et moult le prisoit en son cuer, le pria premi?rement par blandices et par belles paroles, puis l'espoenta par menaces; car il le cuidoit contraindre ? ce que il demourast avec lui, ainsi lui fist faire assez de hontes et de tourmens. Toutes fois quant il vit qu'il ne le pourroit fl?chir en nule mani?re, il l'en leissa aler tout quite ? sa gent: cil se f?ri maintenant en l'eaue. Quant il fu au milieu du fleuve, il se retourna par devers l'ost Thierri, et lui commen?a ? hucier: <> dit-il, <> Quant il eut ce dit, il retourna arri?res, et se soumist ? la seignourie Thierri.

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